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Au fil de l'eau avec les poètes...
Autre auteur, autre : « Chant de l’eau » !
Une rivière en Bretagne…
(Photo prise l’année dernière)
Le chant de l'eau
L'entendez-vous, l'entendez-vous
Le menu flot sur les cailloux ?
Il passe et court et glisse
Et doucement dédie aux branches,
Qui sur son cours se penchent,
Sa chanson lisse.
Là-bas,
Le petit bois de cornouillers
Où l'on disait que Mélusine
Jadis, sur un tapis de perles fines,
Au clair de lune, en blancs souliers,
Dansa ;
Le petit bois de cornouillers
Et tous ses hôtes familiers
Et les putois et les fouines
Et les souris et les mulots
Ecoutent
Loin des sentes et loin des routes
Le bruit de l'eau.
Aubes voilées,
Vous étendez en vain,
Dans les vallées,
Vos tissus blêmes,
La rivière,
Sous vos duvets épais, dès le prime matin,
Coule de pierre en pierre
Et murmure quand même.
Si quelquefois, pendant l'été,
Elle tarit sa volupté
D'être sonore et frémissante et fraîche,
C'est que le dur juillet
La hait
Et l'accable et l'assèche.
Mais néanmoins, oui, même alors
En ses anses, sous les broussailles
Elle tressaille
Et se ranime encor,
Quand la belle gardeuse d'oies
Lui livre ingénument la joie
Brusque et rouge de tout son corps.
Oh ! les belles épousailles
De l'eau lucide et de la chair,
Dans le vent et dans l'air,
Sur un lit transparent de mousse et de rocailles ;
Et les baisers multipliés du flot
Sur la nuque et le dos,
Et les courbes et les anneaux
De l'onduleuse chevelure
Ornant les deux seins triomphaux
D'une ample et flexible parure ;
Et les vagues violettes ou roses
Qui se brisent ou tout à coup se juxtaposent
Autour des flancs, autour des reins ;
Et tout là-haut le ciel divin
Qui rit à la santé lumineuse des choses !
La belle fille aux cheveux roux
Pose un pied clair sur les cailloux.
Elle allonge le bras et la hanche et s'inclina
Pour recueillir au bord,
Parmi les lotiers d'or,
La menthe fine ;
Ou bien encor
S'amuse à soulever les pierres
Et provoque la fuite
Droite et subite
Des truites
Au fil luisant de la rivière.
Avec des fleurs de pourpre aux deux coins de sa bouche,
Elle s'étend ensuite et rit et se recouche,
Les pieds dans l'eau, mais le torse au soleil ;
Et les oiseaux vifs et vermeils
Volent et volent,
Et l'ombre de leurs ailes
Passe sur elle.
Ainsi fait-elle encor
A l'entour de son corps
Même aux mois chauds
Chanter les flots.
Et ce n'est qu'en septembre
Que sous les branches d'or et d'ambre,
Sa nudité
Ne mire plus dans l'eau sa mobile clarté,
Mais c'est qu'alors sont revenues
Vers notre ciel les lourdes nues
Avec l'averse entre leurs plis
Et que déjà la brume
Du fond des prés et des taillis
S'exhume.
Pluie aux gouttes rondes et claires,
Bulles de joie et de lumière,
Le sinueux ruisseau gaiement vous fait accueil,
Car tout l'automne en deuil
Le jonche en vain de mousse et de feuilles tombées.
Son flot rechante au long des berges recourbées,
Parmi les prés, parmi les bois ;
Chaque caillou que le courant remue
Fait entendre sa voix menue
Comme autrefois ;
Et peut-être que Mélusine,
Quand la lune, à minuit, répand comme à foison
Sur les gazons
Ses perles fines,
S'éveille et lentement décroise ses pieds d'or,
Et, suivant que le flot anime sa cadence,
Danse encor
Et danse.Emile Verhaeren
Un petit mot sur l’auteur…
Emile Verhaeren par Théo Van Rysselberghe
Emile Adolphe Gustave Verhaeren, né à Saint-Amand dans la province d’Anvers, Belgique, le 21 mai 1855 et mort à Rouen le 27 novembre 1916, est poète belge flamand d’expression française.
C’est avec plaisir que j’ai découvert ce ravissant poème d’Emile Verhaeren, sur les conseils de mon aminaute Nicole, du blog :
http://lairdularge.eklablog.fr/
C’est un régal, cette eau chante si bien et si légèrement !
Liviaaugustae
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Commentaires
le rêve de mon mari d'habiter près d'une rivière, d'entendre le clapotis de l'eau....mais la rivière est quand même un peu loin de chez nous....passe une bien agréable journée
Bonjour moqueplet,
C'est surement très agréable d'écouter chanter l'eau, mais gare aux crues quand le mauvais temps arrive !...passe une belle journée
Bonjour gazou,
je l'ai découvert, je ne le connaissais pas, c'est vrai qu'il est très beau.
A noter que Verhaeren était Flamant d'expression française, alors qu'aujourd'hui les Flamants refusent de s'exprimer en français.
J'aime beaucoup Emile Verhaeren .Ce poème est magnifique et tellement expressif pictural.
Douce soirée, bonne semaine, bises Livia
Bonsoir flipperine,
C'est un grand poète...il parle si bien de cette rivière qu'on a l'impression de la voir et surtout de l'entendre chanter !
Bonsoir erato,
J'aime beaucoup Verhaeren, mais je ne connaissais pas ce poème si merveilleux.
Douce soirée, bonne semaine, bises erato
14PascalLundi 27 Avril 2015 à 21:58Bonsoir Livia,
Oh ! si vous saviez, en lisant ce poème j'avais réellement l'impression que l'auteur parlait du petit ruisseau qui passe tout près de chez moi. C'est tout à fait ça, à part la jeune fille que je n'ai jamais vue.
Mais les bruits, la flore, les aléas des étés chauds, c'est exactement ce que j'ai chaque jour sous les yeux et où je me promène très souvent.
Alors vous comprendrez que j'adore ce poème, il est magnifique.
Bonne soirée Livia
Bonsoir Pascal,
C'est un magnifique poème, Verhaeren nous fait rêver au fil de l'eau que l'on entend et voit couler.
Peut-être qu'un jour lors d'une de vos promenades vous rencontrerez cette jeune baigneuse...
Bonne soirée Pascal
C'est un très joli poème; J'aime surtout les premières strophes qui me font penser vraiment à l'eau qui coule. Bisous
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Bonjour superbe poème que je ne connaissais pas merci bonne journée