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Art de Vivre
« IRIS PALLIDA »L’or bleu de la parfumerie…Son rhizome vaut de l’or : dans sa plantation grassoise, Chanel tente d’en maîtriser tous les sortilèges.Iris Pallida…Un voile de soie bleue ondule sous la brise, piqué au vif par les têtes écarlates de quelques coquelicots.Ces champs d’iris bleus ondulants à perte de vue, voile de soie sous le soleil, ce doit être en effet un spectacle magnifique… Mais pas de coquelicots en vue.
Nous sommes à Grasse, capitale française du parfum, où Chanel possède des champs de jasmin, de roses et d’iris pallida qui dégourdissent, leur mine chiffonnée au soleil du Midi.
Cette fleur au nom de déesse, que les parfumeurs s’arrachent à prix d’or pour l’odeur tellement subtile qui émane de ses racines, pousse habituellement à flancs de coteaux, sur les terrasses rocailleuses et ensoleillées de Toscane, entre Sienne et Florence. Mais Chanel a décidé d’acclimater la belle au soleil Provençal […]
Les « fameux rizomes si parfumés et si chers»
Son trésor olfactif, l’iris le fait payer cher en exigeant des soins à long terme. Trois années sous terre et une fumure de font sont nécessaires pour permettre aux rhizomes de se développer dans les meilleures conditions avant d’être arrachés, lavés, ébarbés puis tranchés en rondelles. Ce gros travail monopolise 10 à 15personnes pendant deux mois. Suit alors une phase décisive pour la bonne conservation des racines : « En trois jours, posées sur des clayettes dans une chambre chauffée à 30°C, les rhizomes doivent perdre 60% de leur eau pour ne pas moisir ».
Les rizomes coupés…
Il faudra encore attendre deux à trois ans de séchage et de patience pour que la magie opère. A l’abri dans des sacs de jute, les facétieux tubercules prennent tout leur temps pour sécréter les fameux irones, ces cétones qui constituent le principe odorant de l’iris. Déshydratés et durs comme des cailloux, ils sont alors réduits en fine poudre. Distillés à la vapeur après macération dans l’eau froide, la poudre transformée en essence prend une consistance crémeuse à la belle odeur moelleuse. Ce « beurre d’iris » appelé aussi « concrète » est à son tour distillé pour donner l’absolu, une petite merveille d’élégance dont le prix, tout autant que les effluves, donnent le vertige : près de 10.000 € le kilo, ce qui en fait l’un des produits les plus chers de la parfumerie avec le oud. Pour cause : il ne faut pas moins de 13 tonnes de rhizomes frais et cinq à six ans de patience pour obtenir un seul kilo du précieux nectar. On comprend mieux l’intérêt pour Chanel de développer ses propres plantations…
La Pausa, une fragrance de la collection Les Exclusifs, inspirée à Jacques Polge par la villa que Gabrielle Chanel possédait à Roquebrune, est actuellement le parfum qui contient le plus d’extrait d’iris. Et dans son genre le N° 19 n’est pas mal non plus…
Cette saison, Chanel remet sur le devant de la scène une nouvelle création, N° 19 Poudré, il conserve le caractère de son aîné, ses ingrédients clés. Mais lui c’est un tendre, un cocon de douceur. L’iris joue à fond sa partition féminine poudrée…
Et le « N°19 Poudré » Détrônera-t-il le « N°5 » ?
Catherine SAINT-JEAN
Extrait de : Figaro Magasine.
Note liviaaugustae : On comprend mieux pourquoi les parfums sont si chers, après tout ce laborieux, ce long travail, et ces longues années d’attente.
Bonne chance à Chanel, qui nous comble de tant de merveilleuses fragrances !
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