Sain-John
Perse.
Alexis
Leger (dit Saint-Leger Leger), puis enfin Sain-John Perse, est né à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe le 31 mai 1887.
Descendant
de colons français établit aux Antilles depuis la fin du XVIIe siècle, il fit ses études à Pointe-à-Pitre, puis à Pau et à Bordeaux.
Déjà
s’affirmait chez lui une curiosité intellectuelle qui va l’attacher, sa vie durant, à tous les aspects du savoir.
La
rencontre avec Paul Claudel, chez Francis James, à Orthez (1905) encouragea ses premiers essais poétiques et l’orienta bientôt vers la carrière diplomatique. […]
[…]
Jusqu’en 1940, il eut une brillante carrière. Mais demeuré fidèle à une conception de la sécurité collective qui excluait toute compromission avec le nazisme, il quitta la France pour les
Etats-Unis ; le gouvernement de Vichy prononça sa déchéance de la nationalité française.
Nommé
conseillé à la bibliothèque du congrès à Washington (1941), il prit son nom littéraire de Saint-John Perse. Et durant les années de son exil, il
s’attacha à servir la cause de la résistance française à l’étranger, se consacrant à nouveau au voyage, à l’étude et à la poursuite de son œuvre d’écrivain. Philosophe et historien, mais aussi géologue, naturaliste et ethnologue, esprit curieux de musique autant que d’archéologie, Saint-John Perse a édifié, à l’écart des
milieux littéraires, une œuvre poétique monumentale par la noblesse de son ambition et la splendeur de son langage. […]
Indifférente
à toute transcendance, elle exprime pourtant, à travers le foisonnement de ses images, l’ampleur de ses visions et la grandeur de ses mythes, une persistante nostalgie du sacré. Véritable
inventaire du monde, elle en traduit la beauté luxuriante dans une langue riche en vocables rares et métaphores étranges et précieuses. […]
Rétabli
dans la dignité d’ambassadeur de France, il reçut prix Nobel de littérature en 1960.
Il
meurt le 20 septembre 1975 dans la presqu’île de Giens où il repose.
Extrait
: du dictionnaire universel des noms propres du Robert.
Désir
de Créole.
Sur
la croupe du mont que bleuissent les brumes
Il
est un bois, ma sœur, où je veux reposer ;
Là
les colibris verts ont plus vertes plumes,
La
brise suave y vient agoniser
C’est
un bois d’acajou dont les frondaisons chantent
Un
cantique très doux pour qui sait l’écouter.
Loin
du monde méchant, loin des hommes qui mentent
J’y
dormirai tranquille et sans me tourmenter…
Comme
on laisse un ermite et son triste ermitage,
Laissez-moi
sous ma croix, mes amis d’autrefois,
Oh !
n’y venez jamais en long pèlerinage ;
Priez
Dieu dans la plaine, et j’aurais dans mes bois,
La
complainte du vent dans l’acacia qui chante,
Et la
voix des oiseaux au plumage de feu
Et
l’insecte dont la note stridente
Jusqu’au
jour retentit comme un lugubre adieu.
Je
n’écouterai pas la prière des Vierges,
Mais
quand viendra Novembre où l’on fête la mort,
Où
les vieillards cassés s’en vont brûler des cierges
Aux
tombes des enfants, pour adoucir leur sort,
Moi,
j’aurai pour flambeau les yeux des lucioles
Et
j’aurai pour bouquets, sur mon tertre bossu,
Le
jasmin blanc des bois et des lianes folles
Se
balançant au vent sur quelque tronc moussu
Et
parfois, quand la nuit sera pure et sereine,
Que
la lune limpide entre deux noirs sommets
Surgira
lentement ainsi qu’une graine,
Allongeant
sur le sol les cocotiers fluets
Je
m’acheminerai jusqu’à l’aube vermeil ;
Puis,
m’évanouissant comme une vision,
Je me
rendormirai dans le bois qui s’éveille,
Avec
le dernier astre et le premier rayon.
Saint-John
Perse
(Poème
de jeunesse)