• Roméo et Juliette antique...

     

     

     

     

     

    Pyrame et Thisbée

     

    Andreas Nesselthaler

     

     

     

     

     

    Pyrame et Thisbé, l’un des plus beaux des jeunes gens, l’autre la plus admirées entre les filles de l’Orient, habitaient deux maisons contiguës dans la ville qui doit à Sémiramis une haute enceinte de muraille en terre cuite. Ce voisinage les amena à se connaître et favorisa les premiers progrès de leur amour ; il ne fit que grandir avec le temps ; ils auraient même allumé le flambeau d’une union légitime, si leurs pères ne les en avaient empêchés ; ce qu ‘ils ne purent empêcher ce fut qu’une même passion embrasa leurs deux coeurs également épris…

     

    Alors, après de longues plaintes murmurées à voix basses, ils décident qu’à la faveur du silence de la nuit ils essayeront de tromper leurs gardiens et de franchir leurs portes ; u,e fois hors de leurs demeures, ils s’échapperont même de la ville ; pour ne point s’égarer au loin dans leur course à travers la campagne, ils se réuniront auprès du tombeau de Minus et se cacheront sous l’arbre qui l’ombrage. Cet arbre était un mûrier, chargé de fruits blancs comme la neige, qui se dressait au bord d’une fraîche fontaine…

     

    Le visage caché par un voile, elle parvient au tombeau et s’assied sous l’arbre désigné ; l’amour lui donnait de l’audace. Voila qu’une lionne, sa gueule écumante encore teinte du sang des bœufs qu’elle à récemment égorgés, vient étancher sa soif dans l’onde de la fontaine voisine. De loin, aux rayons de la lune, Thisbée, la vierge de Babylone, l’a aperçue ; d’un pas tremblant elle fuit dans un antre obscur et en fuyant elle laisse tomber le voile qui couvrait ses épaules…

     

    Sortiplus tard, Pyrame vois sur la poussière épaisse, les traces certaines de la bête et la pâleur couvre son visage ; mais, lorsqu’il trouve aussi le voile teint de sang : « la même nuit, dit-il, verra périr deux amants ; de nous deux c’était elle qui était la plus digne d’une longue vie ; c’est moi qui suis le coupable…

     

    Il prend le voile de Thisbée et l’emporte avec lui sous l’ombrage de l’arbre convenu ; il couvre de ses larmes ce vêtement bien connu, il le couvre de ses baisers : « Reçois aussi, s’écrit-il, mon sang, que ma main va répandre. » Et, tirant le fer qu’il portait à sa ceinture, il le plonge dans son sein…

     

    Les fruits de l’arbre, sous cette rosée de mort, prennent un sombre aspect et sa racine, baignée de sang, donnent la couleur de la pourpre aux murs qui pendent à ses rameaux. Voilà que, tremblante encore, mais ne voulant faire attendre son amant, Thisbée revient…

     

    Elle reconnaît le lieu, elle reconnaît la forme de l’arbre, mais la couleur de ses fruits l’a fait hésiter ; elle se demande si c’est bien le même. Tandis qu’elle hésite, elle voit avec terreur le corps qui palpite sur la terre ensanglantée…

     

    Alors elle reconnaît le voile et aperçoit le fourreau, vide de son épée : « C’est ta propre main, dit-elle, et ton amour qui t’ont porté le coup fatal, malheureux ! Moi aussi, j’ai une main assez vigoureuse, au moins pour un tel dessein, et j’ai au coeur un amour qui me donnera assez de force pour me frapper. Je te suivrais au-delà de cette vie…

     

    Que ceux qu’un amour fidèle et leur dernière heure ont unis l’un à l’autre reposent dans le même tombeau ; ne leur refusez pas cette grâce. Et toi, arbre, dont les rameaux n’abritent maintenant qu’un seul corps et bientôt en abriteront deux, garde les marques de notre trépas, porte à jamais des fruits sombres en signe de deuil, pour attester que deux amants t’arrosèrent de leur sang. » Elle dit et, ayant fixé la pointe de l’épée au dessous de sa poitrine, elle se laisse tomber sur le fer encore tiède du sang de Pyrame. Cependant sa prière toucha les dieux, elle toucha les deux pères ; car le fruit, parvenu à sa maturité, prend une couleur noirâtre et ce qui restent de leur bûcher repose dans la même urne.

     


  • Commentaires

    1
    Mercredi 7 Décembre 2022 à 05:47

    un beau tableau et une belle histoire que tu nous offres encore ce matin....merci et doux mercredi

      • Mercredi 7 Décembre 2022 à 07:57

        Bonjour Monique,

        La mythologie est toujours très riche en belles histoires, celle ci me plaît particulièrement.
        Belle journée

    2
    Mercredi 7 Décembre 2022 à 09:22

    Eh ben dis donc c'est quand même pas bien gai cette histoire...

    On en voit plus tellement de nos jours des p'tits anges tout nus qui volètent avec leur arc à la main...happy

    Bisous et bonne journée

      • Mercredi 7 Décembre 2022 à 10:47

        Bonjour Lucky,

        L'histoire de Roméo et Juliette n'a jamais été très gai, mais c'est une belle histoire d'amour que Shakespeare  réécrit en s'inspirant de la mythologie.

        Heureusement que l'on ne voit pas de petits anges tout nus voletant dans le ciel, cela ne me rassurerait pas !

        Bisous et bonne journée

    3
    Mercredi 7 Décembre 2022 à 16:24
    Renée

    une variante de cette histoire que je découvre c'est beau mais toujours aussi triste. Bisous bisous

      • Mercredi 7 Décembre 2022 à 20:29

         Bonsoir Renée,

        C'est de cette histoire mythologique que shakespeare s'est inspiré pour écrire sa pièce Roméo et Juliette, c'est triste mais c'est beau.
        Bisous bisous et bonne soirée

    4
    Mercredi 7 Décembre 2022 à 17:37

    Bonsoir Chantal. C'est un amour très fort mais une histoire bien triste. Les fleurs du mûrier tachent tout. Bonne soirée et bisous

      • Mercredi 7 Décembre 2022 à 20:30

        Bonsoir Brigitte,

        Mais comme disait Musset : "Les chants les plus désespérés sont les chants les plus beaux." Je cela très juste.
        Bisous et bonne soirée

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