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    « Or tandis qu'ils discutaient ensemble, Jésus s'approcha et fit route avec eux ; mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. »

     

    (Luc 24, 13)

     

     

    Regard sur l'art chrétien...

    Le Christ et les disciples d'Emmaüs

     

    Théodore Caruelle d'Aligny

     

     

     

    La composition du tableau est remarquable. Les trois protagonistes, qui marchent au premier plan dans un chemin creux, sont à l'ombre, ce qui montre le mystère qui enveloppe encore le Ressuscité, la tristesse des deux disciples et leur incompréhension de la Passion.

     

    Ils sont littéralement, au creux du désespoir et de la déception. Toutefois, un rayon de soleil arrive de la gauche au moment où Jésus leur explique qu'il fallait « que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire ? et effleure leurs têtes, apportant un début de lumière et d'espérance dans leurs esprits. Le peintre a représenté un disciple d'âge mûr et un très jeune, comme on représente Pierre et Jean.

     

    La lumière est bien celle de fin d'après-midi, puisqu'un peu plus loin sur la route, les deux disciples, écrit saint Luc, vont demander à Jésus de rester avec eux à l'auberge pour continuer la conversation : « Reste avec nous, car le soir tombe, et le jour déjà touche à son terme. »

     

    Le visage du Christ est à demi caché, ce qui exprime la difficulté des disciples et de tous les hommes à reconnaître le Ressuscité. Sa haute et imposante silhouette blanche est le point de départ de la composition en V du tableau. Toutes les lignes de fuite partent de Lui. Les exégètes et prédicateurs ont avancé toutes sortes d'hypothèses pour expliquer que les apôtres ne l'aient pas reconnu après avoir marché et parlé longtemps avec lui. Jésus ne voulait probablement pas être reconnu avant la fraction du pain, et a voilé leurs yeux.

     

    A l'arrière-plan se déploie un majestueux paysage de vallée éclairée par le soleil, déclinant toutes les nuances de vert, jaune et bleu de la perspective aérienne. La montagne à gauche à l'horizon est censée être le Mont Thabor. Dans une admirable lumière chaude et dorée, le peintre a représenté au second plan Jérusalem comme un village franc-comtois, rappelant les paysages du Morvan, avec ses toits de tuiles et ses hautes maisons fortifiées étagées sur la pente. Il y insère toutefois une petite tour blanche grecque ou orientale à coupole, à gauche qui ressemble à une église de village. Le bourg est dominé par l'impérieuse silhouette du donjon du château fort en ruines, fondé directement sur le rocher de la colline. Le peintre a repris l'idée de Fra Angelico dans la célèbre Descente de croix se San Marco à Florence : une ville repliée sur elle-même, où n'apparaît nulle âme qui vive, qui n'a pas reconnu son Sauveur. Le donjon symbolise en quelque sorte ce refus.

     

    Théodore Caruelle d'Aligny (1798-1871), d'origine nivernaise, fut directeur de l'école des Beaux-Arts de Lyon pendant dix. Formé dans la tradition du paysage classique, parfois agrémenté de sujets antiques, mythologiques ou religieux, il a néanmoins un style bien personnel, se situant chronologiquement entre le néoclassicisme et l'Ecole de Barbizon. N'étant jamais allé en Orient, il s'inspire pour ses tableaux bibliques de la lumière de Grèce et d'Italie qu'il connaissait bien et qu'il a beaucoup peintes. C'est cette lumière du sud qui baigne ses œuvres, même si le paysage est bourguignon ou nivernais. On peut voir peint par lui un beau Baptême du Christ à l'église Saint-Paul-Saint-Louis, dans le Marais à Paris.

     

    Marie-Gabrielle Leblanc

     

     


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    Une toile représentant une Vierge à l’Enfant, longtemps considérée comme une simple copie du maître italien Sandro Botticelli, s’est finalement avérée être une œuvre originale de l’artiste. Conservée au musée national de Cardiff (Pays de Galles) depuis 1952 suite à une donation, cette toile souffrait de multiples altérations de ses couches de peinture et de son vernis. Un mauvais état qui a laissé penser, pendant longtemps, qu’elle ne pouvait pas être digne du maître. Récemment restaurée, celle-ci a révélé de nombreux secrets qui ne laissent désormais plus place au doute quant à son authenticité. Le visage de la Vierge, d’une grande délicatesse, est caractéristique de la main de Botticelli et les autres dessins, découverts en arrière plan grâce aux photographies infrarouges, s’avèrent être typiques de l’atelier du maître. Des recherches supplémentaires détermineront, dans les mois à venir, quelles sont les zones exactes de l’œuvre qui ont été réalisées directement par la main de Botticelli.


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    Regard sur l'art chrétien...

    Sculpture de Thomas Boudin

     

    (chœur de la cathédrale de Chartres 1611)

     

     

     

    La cananéenne, éplorée, est agenouillée à droite, les mains jointes, suppliant le Christ de guérir sa fille possédée. Jésus se retourne, la regarde et lui parle. Pierre et André regarde la femme avec dédain et agacement, on croirait entendre leurs réflexions désobligeante ; le sculpteur talentueux a mit en scène l'histoire comme sur une scène de théâtre.

     

    L'épisode de la guérison de la fille de la cananéenne, rapportée par saint Mathieu au chapitre 15, nous est racontée par le sculpteur Thomas Boudin, dans le déambulatoire de la cathédrale de Chartres. Cette scène relativement méconnue est rarement représentée dans l'art chrétien, sauf aux Ive-Ve siècles, dans la sculpture paléochrétienne galo-romaine.

     

    Une femme cananéenne poursuit le Christ de ses supplications, au point qu'elle indispose les apôtres. Les disciples demandent à Jésus d'accéder à sa demande pour avoir la paix. Le Christ répond qu'il n'a été envoyé qu'aux brebis d'Israël, et met la foi de cette femme à l'épreuve par des paroles en apparence dures, auxquelles elle répond sans se décourager : «Les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres ! » Jésus, admiratif, fait alors son éloge de manière appuyée : « Ô femme, grande est ta foi ! Qu'il advienne selon ton désir ! »

     

    Ce miracle du Christ est un beau sujet de méditation de Carême sur la foi et la confiance en Dieu qui nous permettent de ne jamais nous décourager, ainsi que sur la nécessaire humilité et la reconnaissance que nous sommes tous de pauvres pécheurs.

     

    La clôture du chœur de Notre-Dame de Chartres, aussi appelée «pourtour du chœur » est un ouvrage monumental sculpté dans la pierre calcaire, qui se déploie sur une longueur de 100 mètres et s'élève à 6 mètres de hauteur. Elle a été commandée à Jehan de Beauce, (architecte à qui l'on doit aussi la flèche du clocher nord)

     

    au tout début du VIe siècle et achevé en 1516.

     

    Outre sa beauté, son utilité était d'isoler le chœur des chanoines, réuni plusieurs fois par jour pour chanter l'office des Heures, de la déambulation incessante des fidèles et des visiteurs. Elle est représentative du style Louis XII français et on y constate le passage en douceur du gothique flamboyant à la Renaissance. Elles ont été sculptées pour la plupart de 1516 à 1548, et sont restées inachevées à cause des guerres de religion. On reprit le travail, avec plusieurs interruptions dans le chantier, tout d'abord en 1610-1611 avec Thomas Boudin, puis avec d'autres artistes. La différence entre les époques est visible pour le connaisseur, mais pas vraiment pour le grand public, l'harmonie générale étant bien respectée.

     

    Le chantier de leur restauration a débuté en 2015, et en 2021, la partie Sud et la partie courbe sont déjà restaurées. Il reste à faire les seize scène du côté Nord.

     

    Marie-Gabrielle Leblanc

     

     

    Regard sur l'art chrétien...

    Le pourtour du chœur de Notre-Dame de Chartres.

     

    (La scène évoquée et décrite par Madame Leblanc se trouve juste en face)

     

     

    Regard sur l'art chrétien...

    Vitraux de la façade du transept Nord

     

     

    Regard sur l'art chrétien...

     Dans les années 1990, le clergé de la cathédrale de Chartres aurait bien voulu faire restaurer un tapis brodé au début du XIXe mais le budget nécessaire était bien trop élevé. « Qu’à cela ne tienne» répliqua le peintre cartonnier chartrain Hervé Lelong «on n’a qu’à en broder un autre ! ». Et c’est ainsi qu’avec Véronique de Luna, qui dirigeait une école de broderie, ils se sont lancés dans l’aventure d’un ouvrage communautaire rassemblant le travail de plus de 200 brodeurs. Et au final, ce n’est pas un mais quatre tapis qui furent réalisés pour habiller, lors des grandes fêtes à la croisée du transept, l’autel d’argent et de granit vert créé par l’orfèvre Goudji en 1991. On peut l’admirer le reste de l’année dans la crypte.

     

     

     

     

     

     

     

     

    J'ai visité La cathédrale de Chartres il y a quelques années, je garde un merveilleux souvenir de cette cathédrale, le pourtour du chœur est une splendeur de pierres ciselées, les vitraux bleus et rouges sont célèbres dans le monde entier et les couleurs des tapis du chœur sont assorties, l'ensemble est magnifique comme vous pouvez le voir sur la photo ci-dessus

     

    Livia

     

     

     

     

     

     


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    Regard sur l'art chrétien...

     

    Roberto Ferruzzi (né à Sibenik (actuellement en Croatie), le 16 décembre 1853 et mort à Venise le 16 février 1934 est un peintre italien.

     

     

    Regard sur l'art chrétien...

    La Madonina est la peinture la plus connue de Ferruzzi. Avec cette peinture, Ferruzzi a remporté, en 1897, la deuxième Biennale de Venise. Il voulait représenter la maternité. Face au succès remporté par cette œuvre, en raison de la forte expression de tendresse qu'elle dégage, le tableau, initialement appelé Maternité est rebaptisé Madonnina, mais il est aussi connu sous les noms de Madonna con bambino, Madonna del Riposo (Notre-Dame du Repos), delle Vie (des Rues), della Tenerezza (de la Tendresse), Madonnella, Zingarella (Petite Gitane).

     

     

    Regard sur l'art chrétien...

    La Madonina (détail)

     

     

     

    J'adore cette Madonina, l'appellation Della Tenerezza (de la Tendresse) lui va merveilleusement bien, j'ai rarement vu un si beau petit Jésus...

     

    Livia

     


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    Regard sur l'art chrétien...

     

    Saint Joseph charpentier

     

    Georges de La Tour

     

     

     

    Ce chef-d'œuvre n'a été redécouvert par un collectionneur, en Angleterre, qu'en 1938, et légué au Louvre en 1948.

     

    Nous sommes à Nazareth. Il est tard, il fait déjà nuit. Joseph a un travail à terminer pour une commande urgente : il faut finir, pour livrer ce soir, ou demain matin à la première heure. Jésus, encore très jeune, 6 à 7 ans environ, aide son père en l'éclairant, et en protégeant la flamme de la grosse chandelle. Il le regarde faire avec confiance et admiration. Il est brillamment éclairé par la flamme : il est la Lumière du monde, Lumière née de la Lumière. Joseph est plus dans la pénombre, concentré sur son travail.

     

    La Tour aime souligner ce paradoxe de l'enfance qui apporte la révélation à la vieillesse. Car c'était un vrai paradoxe au XVIIe siècle, où l'Enfant n'est pas adulé comme de nos jours, mais vu comme un être faible à protéger, un être incomplet qu'il faut instruire et éduquer. Il y avait une grande ferveur envers Jésus Enfant, le Verbe incarné qui s'est fait homme et a accepté de faire tous les apprentissages d'un jeune enfant : apprendre à marcher, à parler, à lire et écrire, à travailler... ce n'est que dans la religion chrétienne qu'un Dieu a travaillé.

     

    La disponibilité de Joseph à la volonté de Dieu est marqué ici par son attitude humble et respectueuse. La Tour a représenté son amour du travail bien fait, qui devrait être celui de chacun d'entre nous, mais qui est plus évident dans le travail manuel et dans l'artisanat.

     

    L'annonce de la Rédemption est présente avec la poutre en forme de croix que façonne Joseph.

     

    On a appelé Joseph le grand silencieux de l'évangile : aucun peintre mieux que La Tour, le maître des nuits, ne sait rendre la densité du silence nocturne.

     

    C'est au XVIIe siècle que commence la dévotion à saint Joseph. Il est peu connu que Louis XIV, lors de son accession au trône, lui a consacré le royaume. De nombreux tableaux, spécialement dans les ordres religieux, représente celui qui fut si proche de Jésus. Dans la peinture française, mais aussi espagnole (Zurbaran, Murillo), il est mis à l'honneur. Tout est parti de sainte Thérèse d'Avila, au XVIe siècle. Elle fut parmi les premiers à prendre conscience que personne, à part Marie, n'a mieux connu Jésus que Joseph. Et si donc nous voulons être des amis du Christ, il faut nous rapprocher de Joseph.

     

    Georges de La Tour a peint là, vers 1645, un de ses plus parfaits clairs obscure. Les tons d'or, de châtaigne et de prune, très chauds, ne sont contrecarrés par aucune teinte froide. Tout l'accent est mis ainsi sur la charité qui régnait au sein de la Famille de Nazareth, et sur la foi lumineuse de Joseph. Notre tableau est contemporain des nocturnes à la flamme les plus célèbres de La Tour.

     

    L'artiste lorrain a dépassé la cinquantaine et vient de rentrer dans sa ville de Lunéville, en ruines après l'atroce guerre de Lorraine, la peste, la famine et les massacres. La flamme dans la nuit représente, en 1645 comme aujourd'hui, l'espérance chrétienne au cœur de l'épreuve. C'est la grâce divine qui vient au secours du croyant dans l'épreuve et le doute.

     

    En cette période de dangers, d'incertitude sur l'avenir, de fatigue et de découragement que nous vivons actuellement, cette année saint Joseph, loin d'être une dévotion comme une autre, est un don de la Providence, pour méditer sur sa vie, son courage, sa foi et sa confiance en Dieu.

     

    Marie-Gabrielle Leblanc

     


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