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    Le soir descend doucement sur le jardin...

    (Ma photo des dernières vacances à Saint-Avé)



    Le Poète

    Des longs ennuis du jour quand le soir me délivre,
    Poète aux chants divins, j'ouvre en rêvant ton livre,
    Je me recueille en toi, dans l'ombre et loin du bruit ;
    De ton monde idéal, j'ose aborder la rive :
    Tes chants que je répète, à mon âme attentive
    Semblent plus purs la nuit !



    Mais qu'il reste caché, ce trouble de mon âme,
    De moi rien ne t'émeut, ni louange, ni blâme.
    Quelques hivers à peine ont passé sur mon front...
    Et qu'importe à ta muse, en tous lieux adorée,
    Qu'au sein de ses foyers une femme ignorée
    S'attendrisse à ton nom !



    Qui te dira qu'aux sons de ta lyre sublime,
    À ses accords divins, ma jeune âme s'anime,
    Laissant couler ensemble et ses vers et ses pleurs ?
    Quand près de moi ta muse un instant s'est posée,
    Je chante.... ainsi le ciel, en versant sa rosée,
    Entr'ouvre quelques fleurs.



    Poètes ! votre sort est bien digne d'envie.
    Le Dieu qui nous créa vous fit une autre vie,
    L'horizon ne sert point de limite à vos yeux,
    D'un univers plus grand vous sondez le mystère,
    Et quand, pauvres mortels, nous vivons sur la terre,
    Vous vivez dans les cieux !



    Et si, vous éloignant des voûtes éternelles,
    Vous descendez vers nous pour reposer vos ailes,
    Notre monde à vos yeux se dévoile plus pur ;
    L'hiver garde des fleurs, les bois un vert feuillage,
    La rose son parfum, les oiseaux leur ramage,
    Et le ciel son azur. […]

    Sophie d'Arbouville


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    Le manoir de Kerazan dans le Finistère

     

    (photo de mon fils)

     

     

     

    Le manoir

     

     

     

    Mon cœur est un manoir croulant et solitaire,
    Un vieux manoir perdu de l'antique Occident
    Entre qui veut ! Le vent, la brume et le mystère
    Par ses corridors vont rôdant.

    Ils sont chez eux dans ce vieux cœur mélancolique,
    Haut et profond et tout tapissé de regrets.
    Dans l'ombre, pour ne pas heurter quelque relique,
    Leurs pas se font lents et discrets.

    Mais toi qui viens si tard dans ma vie et qui portes,
    Comme une torche d'or, ta jeunesse à la main,
    Reste au seuil de mon cœur ; ne franchis pas ses portes :
    Sois la passante du chemin.

    Sois celle dont on dit : « Je l'eusse aimée » et celle
    Qu'on suit d'un long regard songeur, presque attristé,
    Puis qu'on oublie et qui pourtant laisse après elle
    Comme un sillage de clarté.

    C'est assez pour mon cœur. L'ombre peut redescendre :
    Le vieux manoir perdu qui n'a plus d'habitants
    Gardera jusqu'au soir sur sa face de cendre
    Le reflet blond de tes vingt ans.

     

    Charles Le Goffic

     


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    La Vallée-aux-loups, maison de François-René de Chateaubriand à Châtenay-Malabry au cœur du Val d'Aulnay

     

    (image internet)

     

    À la Vallée-aux-Loups.

     

    Vallée-aux-Loups, frais ermitage
    Qu'élut un jour Chateaubriand,
    Son grand cœur est resté l'otage
    De ton décor simple et riant.

    Sous les tulles des soirs d'octobre,
    Par les clairs matins orangés,
    Il aimait pour leur charme sobre
    Ces ciels imprécis et légers,

    Ces pelouses, ces bois, la sente
    Qui verdit sous leur frondaison,
    Et Paris, cuve éblouissante,
    Fumant au loin sur l'horizon.

    C'était de toutes ses demeures,
    Celle qu'il préférait, le nid
    Qui se ferma pour quelques heures
    Sur son vol ivre d'infini.

    L'aigle avait replié son aile :
    Un chaste amour avait soudain,
    Dans l'âpre et rigide prunelle,
    Fondu la glace du dédain.

    À Combourg, sur les landes rases,
    Plane encor son génie amer,
    Et le lamento de ses phrases
    Roule parmi le vent de mer.

    Il ne fut ici que tendresse :
    Le granit s'était animé.
    Et, sur son antique détresse.
    Tout un printemps avait germé.

    * * * * * * *

    Vallée-aux-Loups, frais ermitage
    Qu'élut un jour Chateaubriand,
    Son grand cœur est resté l'otage
    De ton décor simple et riant.

    Et c'est pourquoi nos mains pieuses,
    Tressant des fleurs pour ton fronton,
    Mêlent ces tendres scabieuses
    Au symbolique gui breton.

     

    Charles le Goffic

     

     

    La tour Velléda dans le parc

     

    (C'est dans cette tour que Chateaubriand rédigea plusieurs de ses œuvres.)

     

    (image internet)

     

     


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    C'est une complainte amoureuse digne d'Alphonse Allais que je vous propose aujourd'hui "elles me plûtes" beaucoup !

     

    La complainte amoureuse...

     

    Le baise main du cavalier

    Frédéric Soulacroix

     

     

    Complainte amoureuse

    Oui, dès l'instant que je vous vis,
    Beauté féroce, vous me plûtes ;
    De l'amour qu'en vos yeux je pris,
    Sur-le-champ vous vous aperçûtes ;
    Mais de quel air froid vous reçûtes
    Tous les soins que pour vous je pris !
    Combien de soupirs je rendis !
    De quelle cruauté vous fûtes !
    Et quel profond dédain vous eûtes
    Pour les vœux que je vous offris !
    En vain je priai, je gémis :
    Dans votre dureté vous sûtes
    Mépriser tout ce que je fis.
    Même un jour je vous écrivis
    Un billet tendre que vous lûtes,
    Et je ne sais comment vous pûtes
    De sang-froid voir ce que j'y mis.
    Ah! fallait-il que je vous visse,
    Fallait-il que vous me plussiez,
    Qu'ingénument je vous le disse,
    Qu'avec orgueil vous vous tussiez !
    Fallait-il que je vous aimasse,
    Que vous me désespérassiez,
    Et qu'en vain je m'opiniâtrasse,
    Et que je vous idolâtrasse
    Pour que vous m'assassinassiez !

    Alphonse Allais

     


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    Bien qu'il va être mangé, ce cochon a pourtant l'air de rire...

     

    (image internet)

     



     

    LE COCHON
    (Le plaisir et l'amour)

     

    Car tout est bon en toi: chair, graisse, muscle, tripe !
    On t'aime galantine, on t'adore boudin
    Ton pied, dont une sainte a consacré le type,
    Empruntant son arôme au sol périgourdin,

     

    Eût réconcilié Socrate avec Xanthippe.
    Ton filet, qu'embellit le cornichon badin,
    Forme le déjeuner de l'humble citadin;
    Et tu passes avant l'oie au frère Philippe.

     

    Mérites précieux et de tous reconnus !
    Morceaux marqués d'avance, innombrables charnus!
    Philosophe indolent qui mange ce que l'on mange !
    Comme, dans notre orgueil, nous sommes bien venus
    A vouloir, n'est-ce pas, te reprocher ta fange ?
    Adorable cochon ! animal roi- Cher ange !

     

    Charles Monselet

     



     

    Un mot sur le poète.

     

     

    Estampe à la pointe sèche

    Marcellin Desboutin



    Charles Monselet, né à Nantes le 30 avril 1825 et mort à Paris le 19 mai 1888, est un écrivain, journaliste, romancier, poète et auteur dramatique français.

    Surnommé « le roi des gastronomes » par ses contemporains, il est, avec Grimod de la Reynière, le baron Brisse et Joseph Favre , l'un des premiers journalistes gastronomiques français.



    J''habite à deux pas de la rue Monselet à Nantes, mais je ne connaissais pas les poèmes gastronomiques de ce nantais gourmand... je ne l'ai découvert que récemment au cours d'une lecture.

    Livia

     


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